Ferrari - Schumacher P1, Massa P4
Jean Todt avait décrété l'état d'urgence après Melbourne, où un mauvais choix de pneus avait ruiné les espoirs rouges. La Scuderia a vu revenir à Imola le boomerang de la réussite, aidée cette fois par une température légèrement supérieure aux attentes. A l'échelle du rendement des boules noires, le différentiel marginal a eu des conséquences impressionnantes. On a commencé à comprendre en fin de libres 1 lorsque Michael Schumacher est sorti pour 4 tours, soit 2 lancés, pour assener sa vérité chronométrique, 1.6 sec devant le premier titulaire, Jarno Trulli (Toyota). Bridgestone avait dans sa gamme deux types de pneus dotés d'une large fenêtre de fonctionnement optimale, et tous deux concurrentiels, ce dont Ross Brawn avait perdu l'habitude ! Le reste du week-end fut du même tonneau, même si, en libres 2, Fernando Alonso ôta, dans une charge rageuse, le pompon des mains allemandes.
Samedi, 1:22.795 valait aussi une 66e pole position qui refermait le volet statistique incarnant la superbe d'Ayrton Senna, de toute façon maître incontesté au jeu de la vitesse pure pour la grande majorité des accrédités du paddock.
27°C dans l'air, 43°C sur la piste, ces indices ont frappé les mémoires italiennes pour un jour de grand prix. Les Rouges s'en sont régalés pendant 62 tours d'un plan exécuté de sang-froid dans la cocotte-minute à tifosi. Enfin presque, car un frisson a traversé les nuques de Maranello. Affectée de grainage, la 248F1 de Schumi a vu la R26 d'Alonso revenir comme une balle pour 28 tours de suspense. Un dernier pit exemplaire a propulsé le "Baron rouge" vers sa 85e victoire, un autre record.
Felipe Massa a fait un job irréprochable, àla Barrichello . Qualifié 4e, il n'a certes pas pu tenu sur tout le gp le rythme de son leader mais il a décroché une 4e place qui lui fait un bien fou après les figures de Manama et Melbourne.
Renault - Alonso P2, Fisichella P11
L'équipe française a expliqué samedi avoir un package plus taillé pour la course que pour les essais. Entre aveu sincère et espoir de retourner une situation peu confortable. Sur ce circuit truffé de chicanes, se remettre d'une 5e place signifie prendre un départ agressif et ajuster finement la stratégie. L'Espagnol a fait sa part de travail, pointé 4e au premier tournant, puis 2e en ressortant de son premier pit stop tardif, au 25e tour. Soit 5 boucles de plus que Schumi, leader à cet instant avec 11 sec d'avance, et 10 de plus que Button (Honda) ! Le grainage qui a affecté la Ferrari N.5 a permis au champion du monde 2005 de refaire son retard en 8 tours.
Calé sous l'aileron rouge, l'Espagnol a pressé, varié ses trajectoires pour tenter de trouver l'ouverture derrière l'impassible leader. Sa chance était probablement une petite faute de l'Allemand dans la dernière chicane, ménageant un beau suspense à l'accélération jusqu'à Tamburello. On n'eut jamais droit à cette image. FA a eu le droit d'utiliser sur quelques tours le RS26 à sa pleine puissance, sans résultat. La dernière carte a été abattue sans regret : Pat Symonds a maintenu le 2e pit stop à l'instant décidé en début de course, un tour avant la Ferrari de Schumi. Alonso aurait peut-être pu s'arrêter un tour plus tard que le germanique, mais sans garantie, car selon le stratège d'Enstone la "rossa" était très rapide en pneus neufs. Et puis, Alonso pouvait aussi subir le trafic. Heidfeld (BMW) et Speed (Toro Rosso) évoluaient par exemple une centaine de mètres seulement devant.
"Huit points, c'est bien", lui a-t-il indiqué en substance à la radio, dans les derniers tours. Ils furent parfois délicats à la sortie de Rivazza.
Concernant Fisichella, il faut parler de week-end sans. Pour avoir manqué le top 10 en qualification, l'Italien est parti très chargé, la seule solution pour reprendre quelques places. De retour à un schéma classique de deux dernier relais courts, il n'a malheureusement pu exprimer les agréments du R26B fourni à la hâte par Viry.
McLaren - Montoya P3, Räikkönen P5
On pensait à mieux pour Woking, en retrait en qualification et armé de patience en course. Qualifié 7e, Juan Pablo Montoya a produit une course sans histoires. Les Honda de Button et Barrichello et la Toyota de Schumacher rentrées dans le rang, le Colombien a réglé Massa lors du second pit stop, pour la 3e place. Il n'a pas montré d'impatience et résisté à la tentation de surconduire derrière la deuxième Ferrari.
Kimi Räikkönen a commis une rare erreur en 3e partie de qualification. 8e, il s'est même fait surprendre dans le premier tour par Webber (Williams).
Honda - Button P8, Barrichello P10
Le Grand Prix de Saint-Marin avait commencé dans le dernier tour du Grand Prix d'Australie, lorsque l'ordre avait été donné à Jenson Button de ranger sa RA106 toute fumante avant la ligne d'arrivée. Le sacrifice d'une 6e place et de quelques millions de dollars contre l'assurance de jouer la victoire à Imola, que l'équipe gardait en bonne mémoire pour la pole et la 2e place de l'Anglais en 2004, plus que pour l'exclusion pour tricherie en 2005. "Tout ça pour ça !", doit-on se dire aujourd'hui à Brackey.
Honda s'est pris à rêver après la qualification, avec Button et Barrichello grimpés aux 2e et 3e rangs. Les premiers tours ont vite redimensionné les espoirs, consommés pour Button au 2e pit stop, lorsqu'il fut relâché alors que le matériel de remplissage était encore solidaire de sa RA106... Pompistes déséquilibrés, boa arraché, Button interloqué, au milieu de la pit lane : l'épisode a coûté 22 secondes et 5 places. Un gros paquet de dollars...
Barrichello s'était plaint à Melbourne d'un système de freinage qui ne lui convenait décidemment pas. Sur un tour de qualif, le Brésilien a oublié sa peine mais dès le départ, il a rechuté. 3e et donc à l'intérieur, il a de suite perdu un rang au profit de Massa, puis un autre, offert à Alonso, qui lui a tourné autour à l'entrée de Tamburello. Pour couronner le tout, Honda n'était pas non plus au point pour le recevoir au premier pit, faute d'une bouche d'alimentation en carburant opérationnelle. A mi-course, sa performance a été grevée par des blocages de roues arrières intempestifs, avec les pneus neufs.
Williams - Webber P6, Rosberg P11
Un solide week-end de Mark Webber, manifestement au rendez-vous à une belle place dès que sa mécanique lui permet. 6e à Bahreïn, l'Australien avait dû stopper en Malaisie et chez lui, alors qu'il occupait une place dans le peloton de chasse.
Rentré dans la dernière partie de la qualification, il n'a pu éviter la 10e place sur la grille, mais son premier tour a été remarquable. Ce n'est pas tous les jours que l'on s'offre Kimi Räikkönen sur un freinage. Une belle manoeuvre à Piratella. Il a tenu le Finlandais en respect jusqu'au ravitaillement et a gagné des positions avec les abandons et autres déboires des Honda.
On attendait mieux de Nico Rosberg, qui a fait de la casse aux essais. Qualifié 13e, arrivé 11e.
BMW - Villeneuve P12, Heidfeld P13
Les F1.06 ont manqué du grip tout le week-end. Un drapeau jaune a retenu Jacques Villeneuve en qualification (12e) et à lutter contre sa machine, Nick Heifeld a tapé fort (15e). 12e et 13e dimanche.
Toyota - Schumacher P9, Trulli Ab
Les Toyota n'ont jamais été à leur avantage à Imola, et on peut mettre la contre-performance sur le compte de ce désamour. Ralf Schumacher a été pris dans le trafic et désavantagé par la safety car. Trulli a vite renoncé à cause : direction.
Red Bull - Coulthard P14, Klien P19
Coulthard a avoué qu'il ne savait pas où situer les RB2 en termes de performance vendredi. Samedi et dimanche ont apporté la réponse : nulle part.
Toro Rosso - Speed P15, Liuzzi P16
On commence à se poser des questions sur Vitantonio Liuzzi, qui en a trop fait si l'on juge ses sorties de piste et autres tête-à-queue. L'Italien connaît pourtant Imola comme sa poche. Il y avait même débuté l'an dernier, chez Red Bull. Speed discret mais un rang plus haut.
Midland - Monteiro P17, Albers Ab
Les Midland boys étaient impatients de rouler avec les nouveautés éprouvés avec enthousiasme en tests. Monteiro et Albers n'ont pu rejeter la meilleure des Super Aguri à moins d'une seconde en qualification. Un peu inquiétant. Albers a fait trois tonneaux dans le premier tour, projeté par Ide (Super Aguri) sans rien avoir demandé.
Super Aguri - Sato P14, Ide Ab
Après moult tête-à-queue aux essais, Yuji Ide s'est distingué en course en envoyant la Midland de Christijan Albers en tonneaux, lors d'une attaque suicidaire, au 1er tour. Après coup, les explications du débutant de Super Aguri ont été un grand moment de surréalisme... "En sortant de la seconde chicane, Albers était sur la trajectoire et je n'ai pu éviter le contact avec sa voiture", s'est-il justifié. Albers se trouvait sur la bonne trajectoire, ce qui a surpris le Japonais qui, à sa décharge, n'emprunte pas souvent ces chemins balisés. Un air soulagé a soufflé dans la ligne des stands lorsqu'il a renoncé, plus tard, sur problème de suspension.

Michael Schumacher et Jean Todt retrouvent les joies de la victoire