Revoilà Ullrich !
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Jan Ullrich va mieux. L'Allemand de la T-Mobile a signé sa première victoire de la saison jeudi en dominant la 11e étape du Tour d'Italie, un contre-la-montre rectiligne de 50 kilomètres. L'Italien Ivan Basso (CSC), deuxième derrière Ullrich, conforte pour sa part son maillot rose de leader.
Jan Ullrich ne sera pas venu pour rien sur le Tour d'Italie. Sans autre ambition que de poursuivre sa préparation pour une autre boucle, de l'autre côté des Alpes en juillet, compte tenu de la précarité de sa condition et de son manque d'endurance, l'Allemand souhaitait tout de même se tester sur certaines étapes. Le contre-la-montre autour de Pise en faisait partie. Roulant à souhait, dépourvu de la moindre difficulté, le tracé convenait à merveille à la rutilante mécanique de Rostock. Ullrich avait donc décidé de jouer le coup à fond, histoire de voir où il se situait.
Il a vu, et nous avec. La star de l'équipe T-Mobile s'est tout simplement offert sa première victoire de l'année. C'est à la fois logique et surprenant. Logique, car on savait Ullrich capable de rouler très vite sur ce type de parcours. Il l'avait déjà montré voilà une semaine lors du chrono par équipes, où ses relais avaient impressionné. Or le vainqueur du Tour de France 1997 a affiné sa condition depuis. Sur son seul talent, il pouvait rivaliser. Mais de là à le voir monter sur le podium pour cueillir son premier bouquet de l'année, il restait un pas... que le vent lui a sans doute permis de franchir.
Basso, toujours plus haut
Sans enlever le moindre mérite à l'Allemand, les conditions changeantes lui ont en effet probablement donné le dernier coup de pouce nécessaire. Au fil des heures, le vent s'est levé sur la première moitié du parcours, pénalisant les trente derniers concurrents, qui ont dû composer avec Eole en pleine face. Même si cet avantage est difficile à quantifier, il fut réel. Après tout, peu importe. Ullrich est en forme et a certainement effectué le bon choix en venant en Italie. Il faudra compter avec lui sur le Tour.
Le duel qu'il a livré jeudi avec Ivan Basso avait à ce titre des allures de répétition générale, même si les deux hommes nourrissent des ambitions bien différentes sur ce Giro. Ullrich est venu pour progresser, en pensant au maillot jaune, quand l'Italien n'a encore que du rose en tête. En position de force après la première étape de montagne dimanche, Basso a conforté sa position de patron lors du chrono, démontrant une fois encore ses énormes progrès dans la discipline. Dosant parfaitement son effort, le Lombard n'a cédé que 28 secondes au vainqueur, lui reprenant d'ailleurs constamment du temps dans la partie retour, où le vent ne soufflait plus défavorablement.
S'il doit se contenter de la deuxième place de l'étape, le leader de la formation CSC n'en reste pas moins comme le principal bénéficiaire de la journée, puisqu'il a repris du temps à tous ses rivaux. Basso s'est même permis d'humilier celui que l'on considérait jusqu'à ce matin comme son concurrent le plus direct, Damiano Cunego. Parti cinq minutes en amont, le prodige de Vérone a vu souffler la locomotive rose dans les derniers hectomètres. Un sacré coup de massue pour Cunego, doublé quelques minutes plus tôt pour Jose Enrique Gutierrez. Le voilà relégué à près de sept minutes de Basso au général.
Gutierrez s'accroche
Autant dire que, à la régulière, on voit mal comment il pourrait combler un tel handicap dans les dix jours qui viennent. Même constat pour Gilberto Simoni et Danilo Di Luca, qui suivent à présent Cunego dans la hiérarchie. Parmi les adversaires italiens du maillot rose, seul Paolo Savoldelli a limité la casse. Mais en perdant 50 secondes supplémentaires sur un terrain a priori favorable, le tenant du titre, cinquième de l'étape et quatrième du général, voit tout de même sa tâche se compliquer. Où pourra-t-il reprendre du temps à Basso?
Le casse-tête s'applique désormais à chacun. Le rendez-vous chronométrique a confirmé la supériorité actuelle du protégé de Bjarne Riis, plus que jamais en lice pour la première très grande victoire de sa carrière, même si l'épisode 2005, où il avait perdu une heure vers Ortisei puis dans le Stelvio, l'incite toujours à la prudence. Sa marge de manoeuvre est, disons, confortable. Jose Enrique Gutierrez (Phonak), qui s'accroche dans le rôle du dauphin, navigue quasiment à trois minutes. L'Espagnol, qui s'affirme au fil des jours, est un challenger inattendu, mais pas négligeable. Il est d'ailleurs appréciable de voir qu'à mi-chemin de cette édition 2006, un seul italien, Ivan Basso (devant Gutierrez et Honchar), est installé sur le podium provisoire. Qui a dit que le Giro était une affaire d'Italiens?
Ullrich: "Incroyable"
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Vainqueur du contre-la-montre de Pontedera jeudi, Jan Ullrich était le premier surpris de sa performance, d'autant que l'Allemand s'estime encore assez loin de son meilleur niveau. Fort de cette marge de progression conséquente, il regarde l'avenir avec une sérénité renforcée.
Jan Ullrich a désormais signé au moins une victoire sur chacun des trois grands Tours. Même Lance Armstrong ne peut en dire autant... La saison du plus grand coureur allemand de l'histoire a peut-être véritablement débuté jeudi autour de Pise. Sous un soleil comme il les aime, et sur un tracé comme il les adore, tout plat et tout droit, il a pu donner sa pleine mesure. Quoi qu'il arrive d'ici l'arrivée à Milan dans dix jours, Ullrich a d'ores et déjà réussi son Giro. On l'avait rarement vu aussi performant sur une si longue distance avec seulement 15 jours de course dans les jambes.
Prometteur, forcément prometteur. Faut-il s'en étonner? Oui, si on en croit l'intéressé, visiblement bluffé par sa performance. "Franchement, cette victoire est quelque chose d'incroyable! Je ne pensais pas gagner. Pour moi, le favori était Ivan Basso", assure Ullrich, qui a finalement devancé le maillot rose italien de 28 secondes sur la ligne d'arrivée. "J'ai tout de suite vu que j'étais dans un bon jour, ajoute-t-il. Le parcours était idéal pour moi, plat et avec très peu de courbes. "
Il progresse de jour en jour
Ce n'est pourtant qu'au premier pointage intermédiaire que le natif de Rostock a compris qu'il pourrait jouer la gagne. Parti un peu dans l'inconnu, Jan the Man était crédité après 14 kilomètres du deuxième chrono, à six secondes du Belge Marc Wauters, parti bien avant lui, et qui avait bénéficié de conditions plus favorables encore au niveau du vent. "Quand j'ai eu connaissance des temps intermédiaires, j'y suis allé à fond", confie Ullrich, auteur d'un gros parcours retour, même s'il concéda du temps à Basso dans cette partie. Mais l'Italien, piégé par le vent de face au départ, avait pris trop de retard.
"Jan a réalisé une énorme seconde moitié de chrono. C'est ce que nous avions prévu. Il devait lâcher les chevaux avec le vent dans le dos", confirme Rudy Pevenage, le directeur sportif de l'équipe T-Mobile et mentor d'Ullrich. Ce succès confirme en tout cas que l'Allemand est dans le vrai. Le mollet beaucoup plus saillant qu'à la fin du mois d'avril lors du Tour de Romandie, où il avait repris la compétition, il progresse de jour en jour. Pevenage n'a d'ailleurs jamais douté de son poulain, et ce début de Giro l'a conforté: "Quand j'ai vu la manière dont il travaillait sur les premières étapes, j'ai su que Jan était sur de bons rails ".
"Sur la bonne voie"
Venu avec un plan de travail bien précis à Seraing au départ de ce Tour d'Italie, Ullrich le respecte à la lettre. Tout se passe comme prévu. C'est suffisamment rare pour être souligné, car l'Allemand nous a plus souvent habitués aux contretemps qu'aux lignes droites dans son mode de préparation. Cette fois, il ne se départit pas de la route tracée. Il voulait faire le chrono par équipes à bloc. Il l'a fait, et plutôt bien. Il voulait se tester dans le premier col samedi. Mission encore accomplie. Ce premier chrono constituait son gros objectif du mois de mai. Il l'achève sur une victoire.
Jusqu'ici, tout va donc pour le mieux. "Je ne suis pas encore à 100% de ma condition, rappelle-il malgré sa victoire. Cela veut dire que je suis sur la bonne voie pour le Tour." Et maintenant? La meilleure solution pour le grand Jan est sans doute de ne rien changer à son approche. "Je vais continuer le Giro dans le même état d'esprit, en me testant me tester dans certaines étapes de montagne, et en me contentant de suivre le 'gruppetto' dans d'autres", précise-t-il. Physiquement, il n'a effectivement pas les moyens de se mêler à la bagarre pour le général. 44e du général, Ullrich redeviendra dans les prochains jours un anonyme dans le peloton. Ça lui va très bien...