Horrach et désespoir
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Final de folie vendredi lors de la 12e étape du Giro. Les Italiens Manuele Mori et Emanuele Sella ont chuté à deux reprises dans les derniers kilomètres. C'est un autre membre de l'échappée, l'Espagnol Joan Horrach, qui en a profité pour s'imposer. Journée tranquille pour Ivan Basso.
Le Giro se souviendra de son passage dans la station balnéaire de Sestro Livante, où il faisait escale pour la première fois depuis le début des années 60. Non qu'il aura joué un rôle majeur sur le dénouement de l'épreuve, mais le final de cette étape de transition, coincée entre un contre-la-montre capital et un week-end montagneux qui pourrait s'avérer décisif, a offert son lot d'émotions et de rebondissements. De ce scenario un peu fou, Joan Horrach est finalement le principal bénéficiaire. Entre audace et opportunisme, l'Espagnol a décroché la victoire la plus significative de sa carrière, à 32 ans.
Présent dans la longue échappée de 15 coureurs lancée dès le huitième kilomètre par le Français William Bonnet, Horrach ne fut pourtant pas le plus en vue. Il n'était ni le plus impressionnant dans les trois ascensions du jour, ni le plus rapide au sprint. Au final, c'est pourtant lui qui a raflé la mise, offrant à la formation Caisse d'Epargne son premier succès sur ce Giro 2006, où les Italiens ont décidément du mal à se faire respecter. Sur 11 étapes en ligne, seules trois ont été enlevées par les autochtones, grâce à Savoldelli, Basso et Pelizzotti.
La plus belle d'Horrach
Il s'en est fallu de peu pour que les Transalpins n'épinglent une quatrième victoire dans la région d'Alessandro Petacchi, grand absent de la journée alors que la course traversait sa ville natale, La Spezia. Dans la dernière descente, Manuele Mori et Emanuele Sella faussèrent en effet compagnie au reste du groupe, au sein duquel ne figuraient déjà plus les trois seuls représentants tricolores, Mickael Delage, Arnaud Labbe et William Bonnet. Ces deux-là étaient partis pour se disputer la victoire...
A environ cinq kilomètres de l'arrivée, dans un virage, Mori perdait alors l'équilibre, au point de finir en contrebas. Pris de panique, Sella se retrouvait lui aussi à terre, après avoir rebondi sur le rail de sécurité. Plus de peur que de mal pour les deux hommes, qui furent en mesure de repartir aussitôt. Mais le groupe de poursuivants, mené par Horrach, Belli, Engels et Baliani, avait eu le temps de recoller. Sans se décourager, Mori repartait de plus belle... avant de rechuter deux bornes plus moins.
Encore plus incroyable, Sella, qui eut le malheur d'arriver juste derrière, se retrouvait lui aussi au tapis pour la seconde fois. Difficile de faire plus poissard. Malgré un nouveau retour sous la flamme rouge, les deux compagnons d'infortune n'allaient plus avoir l'occasion de s'imposer. Au moment où ils effectuaient la jonction, Horrach avait filé pour de bon. A 32 ans, le Majorquin, passé professionnel sur le tard en l'an 2000, n'avait plus gagné depuis la saison 2003, lors du Trophée Joachim Agostino. Aucune de ses six victoires précédentes n'avait l'éclat de celle acquise à Sestri Levante.
Honchar au plus mal
Journée beaucoup plus calme pour Ivan Basso. Le maillot rose a certes fait travailler ses équipiers, mais uniquement pour assurer un tempo derrière l'échappée Résultat, le peloton a concédé sept minutes sur la ligne. Tant mieux pour Emanuele Sella, qui n'aura donc pas tout perdu dans son escapade. Le petit grimpeur de la Panaria, 22e du général au départ de Livourne, pointe désormais à la quatrième place. Un bond de géant, tout comme ceux opérés par Wladimir Belli et Manuel Beltran, deux autres membres de l'échappée, qui intègrent eux aussi le Top 10.
A l'inverse, Serhiy Honchar le quitte. Victime d'une chute en début d'étape, qui a laissé sur le carreau le Basque Roberto Laiseka, le vétéran ukrainien a sans doute perdu toute chance de figurer sur le podium à Milan. A la dérive dans la montée du Passo del Braco, pourtant relativement abordable, il a perdu 6'37" sur le peloton principal, et dégringole du coup à la 21e place au général, laissant l'équipe T-Mobile sans véritable leader pour la suite de la bataille...
Sella: "C'est dommage"
Malheureux, Emanuele Sella a peut-être raté la victoire d'étape vendredi, mais il se console en se hissant à la 4e place du général. Retrouvez les principales réactions enregistrées à Sestri Levante.
Joan Horrach (Caisse d'Epargne-Baléares)
"Quand Sella et Mori avaient 20 secondes d'avance, je pensais que c'était gagné pour eux. Pour moi, c'est la victoire la plus belle. Il n'y a que 21 étapes dans le Giro, alors en gagner une... Nous n'avons personne pour le classement général, nous avons donc toute liberté pour aller dans les échappées. Un parcours comme celui-ci, de moyenne montagne, me convient."
Emanuele Sella (ITA/Panaria)
"Je savais que la descente pouvait être dangereuse. Dans un virage serré, Mori est tombé devant moi et je n'ai rien pu faire pour éviter la glissière sur le bord de la route. Un peu plus tard, Manuele (Mori) est tombé de nouveau et je me suis retrouvé aussi par terre. C'est infiniment dommage car nous avions 90 pour cent pour chance de nous disputer la victoire tous les deux."
Ivan Basso (ITA/CSC)
"C'était une étape difficile mais aucune étape n'est facile, soit à cause du parcours, soit à cause de l'allure. Ce Giro ressemble de plus en plus au Tour de France. Même les départs d'étape sont rapides. Mais, c'est beau, on ne s'ennuie pas. Dans le final, on n'a pas pris de risque. On savait qu'il y avait eu des chutes. La prochaine étape ? Le San Carlo est un vrai col, il devrait y avoir des changements au classement. Pour l'instant, la course repose sur notre équipe.
On ne peut pas surveiller tout le monde, on se concentre sur six ou sept coureurs. Plus tard, ceux qui seront placés au classement auront des intérêts communs avec nous. Cunego et Simoni ont dit qu'ils couraient pour la deuxième place ? Je ne pense pas qu'ils le croient vraiment. Je m'attends à ce qu'ils me rendent la vie difficile. Quant à Savoldelli, s'il fait un numéro en descente après le San Carlo, je ne chercherai pas à le suivre à tout prix. Lui, c'est une moto en descente. J'irai à mon rythme. Mais je crains davantage les montées que les descentes..."
Jorg Ludewig (ALL/T-Mobile)
"Je suis un peu déçu du résultat. Mais avec Sella, nous avions un coureur potentiellement dangereux pour le général. C'est pourquoi l'allure était très élevée à la fin. C'est dommage de ne pas avoir pu suivre le groupe jusqu'au bout, car je crois que mes chances de victoire auraient été bonnes. Mais je préfère encore être battu à l'avant de la course plutôt que de rester à l'arrière du peloton."
Dominique Arnould (Directeur sportif Bouygues Telecom)
"C'est dommage car c'était la bonne échappée. Malheureusement Arnaud Labbe et les autres Français n'ont pas pu suivre le rythme dans la première ascension. ((A propos de l'abandon d'Andy Flickinger) Il était en souffrance tous les jours depuis sa chute lors de la 2e étape à Namur. Il valait mieux qu'il s'arrête".
