Grande battue des classiques du printemps, l'équipe Davitamon-Lotto se refait tranquillement la cerise en Romandie. Pas de quoi remplacer un Paris-Roubaix ou un Tour des Flandres au palmarès, bien sûr, mais tout de même. En deux jours, la formation belge vient de s'offrir deux victoires d'étapes, dans deux registres complètement différents, ce qui n'est que plus satisfaisant. Près le succès au sprint de Robbie McEwen mercredi, Chris Horner s'est imposé à Porrentruy, au terme d'une étape de moyenne montagne pour le moins pluvieuse.
L'Américain est sorti en costaud et en solitaire à cinq kilomètres de l'arrivée, en s'extrayant d'un groupe de sept coureurs, où figuraient également le maillot jaune, Paolo Savoldelli, le leader du Pro Tour, Alejandro Valverde, Andrey Kashechkin, Alexander Moos, Jorg Jaksche et son coéquipier Cadel Evans. Les hommes de tête avaient fait la différence dans la descente ultra rapide du col de la Croix, dernière difficulté du jour, après un premier écrémage dans l'ascension. Le mauvais temps a rendu plus sélectif que prévu un tracé qui n'avait pourtant rien de très effrayant à l'origine.
Ullrich à 10 minutes
On voyait dès lors Valverde s'imposer gros comme le nez au milieu de la figure, compte tenu de sa pointe de vitesse au sprint, d'autant qu'il avait mis con équipe à contribution, notamment Joaquin Rodriguez, preuve de son ambition. Mais il n'ne fut rien. Déjà tout près de la victoire dans le prologue (NDLR: Il n'avait été battu que pour moins d'une seconde par Savoldelli), le Murcien a cette fois été piégé par l'attaque d'Horner. Pris en chasse par Moos et Jaksche, l'Américain allait conserver l'avantage jusqu'au bout.
En devançant la meute de quelques secondes (cinq pour Moos et Jaksche, huit pour le groupe maillot jaune), auxquelles il convient d'ajouter une bonification, Horner s'empare du même coup de la tête du classement général, avec une marge de manoeuvre de sept secondes sur Savoldelli et Valverde. Capable de tenir la distance en montagne, le vétéran Yankee (34 ans) pourrait avoir un coup à jouer dans les prochains jours, même si la victoire finale semble encore loin. Quoi qu'il arrive, il a de toute façon déjà réussi sa semaine.
Pour d'autres, la journée fut plus pénible. Jan Ullrich n'avait pas d'ambition particulière en venant en Suisse. Heureusement. L'Allemand, qui abhorre la pluie, a terminé dans le gruppetto, à dix minutes du vainqueur. Il se trouvait, notamment, en compagnie de Chirstophe Moreau. Mais au moins le Français avait-il eu le mérite de se montrer. Sur ses routes d'entrainement, puisqu'il réside à Porrentruy, le Belfortain s'est offert un bon de sortie pendant plus de 50 kilomètres. En vain, malheureusement, puisqu'il s'est retrouvé en chasse patates derrière les deux Suisses Roger Beuchat et David Loosli. Juste de quoi se dégourdir les jambes...
«Tout me fait mal!» |
 |
JAN ULLRICH Pour son premier contact de l'année avec des ascensions dans une compétition officielle, l'Allemand de Scherzingen a perdu la bagatelle de 10 minutes  |
 |
 |
BAIN DE FOULE Détendu et disponible, Jan Ullrich a fait plaisir aux chasseurs d'autographes de Porrentruy. |
 |
Son panneau «Ich liebe dich Jan Ullrich von Fanny» dans la main gauche, la jeune Jurassienne s'est précipitée vers son idole. De sa main droite, la groupie lui a tendu un cadeau tout de jaune emballé. Surpris mais content de cette attention, le Thurgovien d'adoption s'est fendu d'un «merci, merci beaucoup» dans la langue de Molière avant de répondre aux journalistes allemands. Le leader de T-Mobile a pris le temps de donner de ses nouvelles. De rassurer tout son monde sur une condition physique encore loin de lui permettre d'effectuer des numéros que ce soit dans les chronos et les bosses. Le sourire aux lèvres malgré sa 112e place de l'étape à 10' 01" de Chris Horner, Jan Ullrich s'est dit heureux. «Je suis un homme heureux. J'ai franchi l'arrivée. Mais je ne vous le cacherai pas. Tout me fait mal! Je me suis réjoui de la douche, du massage et d'une nuit de sommeil réparatrice. J'ai peiné dans cette étape difficile compte tenu des différentes ascensions mais aussi des conditions météorologiques. Dans le final, je me suis vite retrouvé dans le gruppetto. L'essentiel, c'est d'accumuler des kilomètres avec le rythme de la course.»
Le maillot jaune encore sur les épaules, Paolo Savoldelli, juste avant le départ avait émis des doutes quand aux problèmes rencontrés par l'Helvète d'adoption. «Jan Ullrich n'est pas tombé si bas. Je l'ai un peu observé depuis mardi. A mes yeux, il va vite retrouver son coup de pédale. Je suis plutôt surpris de tout ce que j'ai lu sur lui. Il sera prêt pour le Tour de France.» Quelques heures plus tard, le principal intéressé s'est montré tout aussi optimiste. «Mon genou tient bien. Je peux appuyer correctement sur les pédales. Je ne veux pas brusquer mon retour et brûler des étapes. En Toscane, lors de mon camp d'entraînement de ces quatre dernières semaines, mon détecteur de fréquence cardiaque n'a pas dépassé les 140. Aujourd'hui, je ne suis jamais monté au-delà de 170 pulsations/minute. Même quand nous avons attaqué à bloc les deux dernières difficultés. Il en ira de même jusqu'à Lausanne. Comme déjà dit avant de débuter le Tour de Romandie, je ne suis pas là pour un classement, ni même pour faire un résultat.» |